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Une fille au Max - extrait

Théâtre

Titre :                                   UNE FILLE AU MAX                      Durée :         1 h 30 à 1 h 45

Auteur :                   Noël PIERCY

Résumé :                 Florence, récemment séparée de son petit ami, aspire à profiter de son célibat. Son programme : Solitude et tranquillité.   Elle rêve de vivre pour elle, rien que pour elle. Faire ce qu’elle a envie quand et comme elle en a envie. Ce programme va être remis en question par :  une mère inquiète et une sœur autoritaire, trop présentes, une amie en galère qui vient s’installer chez elle et qui en profite, à l’insu de Florence, pour ramener son nouveau petit copain, un beau frère soumis, pas si soumis que cela et un ami qui vient confier ses états d’âme. Adieu les espoirs de quiétude.

Personnages :        3 hommes 4 femmes (entre parenthèses, le nombre de répliques)

            Florence : (243)    Souhaitant un peu de solitude, elle est prise dans le tourbillon engendré par ses proches.

            Thérèse : (105)      Mère de Florence. Inquiète et envahissante.

            Patricia : (84)         Sœur de Florence. Autoritaire. Une référence pour Thérèse.

            Rémy : (109)          Mari de Patricia. Il n’a pas son mot à dire mais…

            Charlotte : (153)   Copine incruste. Toujours en galère.

            Max : (131)             Nouveau petit copain de Charlotte. Zonard, sans gêne et sans scrupule.

            Raphaël : (84)        Ami de Florence. Amoureux en secret de Patricia.

Décor :          Salon simple mais coquet. Canapé, mini bar. Table basse.

Fond Jardin, Couloir donnant sur l’entrée principale. Avant jardin, sortie cuisine. Fond Cour, sortie vers les chambres. Avant Cour, porte salle de bain.

Déclaration SACD le :     14/02/2021

e-depot N° :                       00425799

Une fille au max !

Acte 1

Scène 1 : Florence - Thérèse

(Florence est assise dans un canapé, elle lit un magazine people en buvant un verre. Elle rit de ce qu’elle lit. Sur la table, 2 ou 3 autres revues. Sur le dossier du canapé, un manteau).

Florence       Quel tissus d’âneries ! Ils sont prêts à inventer n’importe quoi pour vendre leur papier. Et ça marche ! La preuve, j’ai acheté. (Lisant) N’importe quoi ! (Son portable sonne. Elle regarde qui appelle, soupire et ne décroche pas). « Maman ! ». Ca fait 4 fois en ½ heure. (Elle va se resservir un verre et prend un autre magazine). (Elle lit en couverture) « Jimmy Corner, le roi de la Pop Music, hospitalisé en urgence » Qu’est ce qui lui est arrivé ? (En cherchant la page) Il a avalé une nouille de travers ? Il s’est coincé le doigt dans une porte ? (Elle lit) … Ah non ! C’est pas le doigt, c’est autre chose… et ce n’est pas dans une porte, c’est dans sa braguette. (Elle tourne les pages) ... Il n’y a même pas de photo ! (Son portable sonne à nouveau) Et de 5 ! Elle ne va pas me lâcher tant que je ne répondrai pas. (S’adressant au téléphone sans décrocher) Maman ! Pourrais-tu comprendre que j’ai envie d’un peu de solitude ? Non, ça, elle ne comprend pas ! Elle est gentille mais un peu envahissante. Bon, aux grands maux, les grands remèdes, je coupe tout et je vais prendre une douche, ça me fera plus de bien que d’entendre des reproches et des leçons de morale. Oui, je sais, ce n’est pas très gentil vis-à-vis de sa propre mère, mais il y a des moments où… hein ! Bon ! (Elle coupe le téléphone et sort salle de bain un temps – on sonne à la porte – un temps - Thérèse entre)

Thérèse        On pourrait sécher devant la porte que personne ne viendrait ! Heureusement que j’ai la clé. Florence !... Florence !... Mon Dieu pourvu que… (Elle sort vite vers chambre et revient) Ouf ! Non ! J’ai eu peur un moment qu’elle… ! Elle n’est pas sortie, son manteau est là ! Ou alors, elle est sortie sans manteau ! Vraiment pas prudente ! (Elle fait le tour de la pièce du regard) Regardez-moi ce capharnaüm ! Quel laissez aller ! (Elle commence à ranger le manteau dans l’entrée principale – rattroupe les revues – renifle le verre) Du whisky ! En plein après–midi ! J’espère qu’elle ne va pas trop tarder. (Elle essaie de téléphoner) Mais pourquoi ne répond-elle jamais ? (Elle voit le portable de Florence) C’est sûr qu’elle ne risque pas de répondre. Elle devrait bien se douter qu’on s’inquiète pour elle. Une rupture, c’est toujours difficile et on a besoin de soutien !... Où peut-elle être ?... Chez le médecin ! C’est ça ! Elle est chez le médecin ! Elle déprime, c’est sûr, alors elle est allée voir son médecin ! Mais qu’est-ce qu’il va pouvoir faire, lui ? Il y a des remèdes pour les ruptures amoureuses ? Non ! Il va juste la bourrer de tas de cochonneries ! Anti dépresseurs ! Anti anxiolytiques ! Somnifères ! Elle va devenir un zombie ! Ne va plus aller au travail ! Va se mettre à boire ! D’ailleurs elle a déjà commencé ! Bravo la médecine !... (Elle met la bouteille et le verre sur le bar) Qu’est-ce qu’on peut faire ?... Être là ! C’est ça ! Être là, avec elle ! Ne pas la laisser sombrer ! Il faut que j’appelle sa sœur ! (Au téléphone) … Ah Patricia ! Toi au moins tu réponds !... Non, moi ça va ! Je suis chez ta sœur !... Ben oui, Florence ! A ma connaissance tu n’as qu’une sœur, à moins qu’on ne m’ait pas tout dit… Mais non, je ne suis pas énervée, je suis inquiète… oui, pour Florence. Tu connais la nouvelle ?... Non ! Florence et Kévin se sont séparés.… Hein ? C’est Alex, pas Kévin ! Tu es sûre ?... Oui peut-être, ça ne change rien !... Oui, il y a trois jours. J’ai croisé une collègue de travail de Florence, c’est elle qui me l’a dit... J’ai essayé de l’appeler plusieurs fois, sans réponse ! Imagine dans quel état elle doit être !... Oh, tu sais, ça va très vite pour se retrouver au fond du trou… Non, elle n’est pas là ! Je ne sais pas où elle est et elle n’a même pas pris son téléphone. Ca m’inquiète ! Tu pourrais venir ?... Oui, maintenant, tout de suite !... Avec Rémy ?.... C’est qui, Rémy ?... Ah oui, ton mari ! Je ne vois pas à quoi il pourrait nous être utile, mais si tu veux l’amener… A tout de suite !...(Elle raccroche) En attendant je vais aller faire la chambre, le lit n’est même pas fait ! Pfff ! (Elle sort chambre Florence sort de la salle de bain en peignoir, finissant de se sécher les cheveux)

Florence       Ca fait du bien ! Je vais m’habiller et j’irai faire un peu de shopping. (Elle va sortir chambre, marque un temps d’arrêt, regarde la pièce) Où est passé mon manteau ?... Et sur la table, il y avait une bouteille et un verre… et les revues n’étaient pas comme ça… Qu’est-ce que…

(Retour de Thérèse)

Thérèse       Ah ! Tu es rentrée saine et sauve ! Ouf ! Merci mon Dieu.

Florence      Maman !? Qu’est-ce que tu fais là ?

Thérèse       J’étais dans ta chambre, je refaisais le lit !

Florence       Le lit !? Alors, toi, tu rentres chez les gens sans y être invitée, déjà, est ce bien normal ?

Thérèse        Ce n’est pas chez les gens, c’est chez toi. Je n’ai tout de même pas besoin d’une invitation officielle pour venir chez toi !

Florence       Oui, bon, passons ! Alors tu rentres et tu vas dans la chambre faire le lit. Pourquoi pas ? Faudra que j’essaie la prochaine fois que j’irai chez des amis. Ca leur fera sûrement plaisir !... Je suppose que c’est toi, également, qui a fait du rangement ici.

Thérèse       Oui, vu le chantier !

Florence       Oh le chantier ! Tout de suite les grands mots ! Pour deux magazines et un verre…

Thérèse        Et une bouteille et un manteau ! Mais dis-moi ! Tu n’es tout de même pas allée chez le médecin, dans cette tenue !?

Florence      Quoi ? Chez le médecin ? Qu’est ce que tu racontes ?

Thérèse        Enfin ma fille ! Sortir en peignoir ! Je sais que tu es perturbée mais tout de même.

Florence       Maman, je suis en peignoir parce que je sors de la salle de bain. Ca me paraît relativement normal, non ? Et pour quelle raison serais-je allée chez un médecin ?

Thérèse        Ecoute, je suis ta mère, tu peux me parler à moi ! Je sais que tu passes des moments difficiles et…

Florence      Mais quels moments difficiles ? De quoi tu parles ?

Thérèse        Mais enfin, Florence je suis au courant, ton… enfin ta… ta séparation ! Mon Dieu, te faire ça à toi. Comment a-t-il pu ?

Florence      Ah c’est ça ! Mais, maman, il ne faut pas t’inquiéter ! Tout va bien.

Thérèse        Oui, je sais ! C’est ce qu’on dit ! Tu ne veux pas que je me fasse de souci alors tu prétends que ça va. Mais je sais ce que c’est ! Je sais bien qu’au fond de toi, tu es dévastée, ravagée…

Florence       Rien que ça ? Mais non, maman ! Absolument pas ! Je t’assure que tout va bien. J’avoue, je suis un peu amère. Deux ans de vie commune, ça compte. Mais c’est comme ça ! Nous avons fait le constat, Alex et moi, que nous étions devenus trop différents pour vivre ensemble : plus la même vision de la vie, plus les mêmes centres d’intérêt, plus les mêmes envies. Après avoir fait ce bilan, nous avons décidé de nous séparer, tout à fait amicalement, sans rancune, ni rancoeur. Point ! C’est tout ! Et tout - va - bien !

Thérèse        Oui, bien sûr ! Prends-moi pour un jambon pas frais ! Tout va bien ! Pfff ! Ne me dis pas que cette séparation ne te touche pas. C’est dommage, je l’aimais bien ce Maxime !

Florence       Ce ? Maxime, tu l’aimais bien !? Alors, pour ton information, Maxime, s’appelle Alex ! Et en deux ans tu ne lui as pas adressé cinq fois la parole !

Thérèse        N’empêche que je l’appréciais beaucoup. Tout comme… heu… l’autre avant… Mon Dieu, comment s’appelait-il, celui là ?

Florence      Thibaut !

Thérèse       Oui ! Lui aussi était très bien !

Florence       Oui, il était très bien ! Il me trompait à tour de bras, mais à part ça, il était très bien !

Thérèse        Oh, évidemment, si tu t’arrêtes à ce genre de considération… Il te trompait ! Et alors ?

Florence      Et alors !?

Thérèse        Eh bien tu n’avais qu’à faire pareil ! Et tout aurait été pour le mieux !

Florence       (Un temps Florence est effarée) Maman, je pense qu’on n’a pas la même conception des relations Homme / Femme.

Thérèse        C’est sûr ! Tu es trop difficile !... Tu devrais prendre exemple sur Patricia… Ta sœur, elle, elle a une vraie vie, stable, normale.

Florence       Voilà le couplet sur ma sœur, je l’attendais. C’est quoi une vie normale ? Le mariage, la maison, les gosses ? Et puis entre nous, je plains Rémy.

Thérèse       Qui ?

Florence       Rémy ! Le mari de ma sœur ! Il serait peut-être temps de te rappeler son prénom.

Thérèse        J’ai toujours eu du mal avec les prénoms ! J’ai appelé ton père Roger, pendant des années, alors qu’il s’appelait Gilles. Mais revenons-en au mari de ta sœur. Patricia est très bien avec lui. C’est vrai qu’il est plus âgé mais il est très bien (NDA facultatif). Et mon Dieu, pourquoi dis-tu que tu le plains ?

Florence       Je me demande comment il fait pour la supporter, il ne peut pas dire deux mots sans se faire remettre en place. Le pauvre. C’est elle qui décide de tout.

Thérèse        Parce que c’est un faible ! Il y a des gens comme ça qui ont besoin d’être dominés. Ta sœur est forte et lui, un faible. Donc elle ordonne, il exécute. Rien de plus normal !

Florence       Tu as de drôles conceptions de la vie ! Je le plains parce qu’il n’a aucun libre arbitre ! Aucun mot à dire. Elle l’écrase, elle l’étouffe. J’imagine que même au lit c’est elle qui décide.

Thérèse       Là, tu vas peut être un peu loin.

Florence      Le jour où il va se rebiffer…

Thérèse        Lui, se rebiffer ! C’est pas demain la veille ! Mon Dieu, lui, se rebiffer.

Florence       Je ne parierais pas là-dessus. Et puis arrête de dire « mon Dieu » sans arrêt, tu es aussi croyante qu’un poisson rouge.

Thérèse        Oui, c’est vrai ! Je ne crois pas. Malgré tout, ça ne m’empêche pas de faire une petite prière de temps en temps.

Florence      Toi ? Tu fais des prières !?

Thérèse        On ne sait jamais. Si vraiment, il y avait un paradis, ce serait dommage de passer à côté.

Florence       Bref ! Si la vie que mène ma sœur est ce que tu appelles une vie normale, merci bien, très peu pour moi.

Thérèse       Pfff ! Après tout, c’est ton affaire, et je ne veux pas m’en mêler !

Florence      (En aparté) Si ça pouvait être vrai !

Thérèse       Et puis, c’est peut-être ma faute.

Florence      Ta faute ? Pourquoi ?

Thérèse        Tu es la plus jeune, la petite dernière. Peut-être t’ai-je trop couvée, trop protégée. Et voilà le résultat ! Tu n’es pas capable de discerner ce qui est bon pour toi.

Florence       Ne t’inquiètes pas, je me débrouille très bien et je pense m’en sortir pas trop mal.

Thérèse       Ca dépend pour quoi ! Côté relations affectives, ça laisse à désirer.

Florence      Pas du tout. Ca me convient très bien comme ça pour le moment. Je n’ai pas envie de me caser.

Thérèse        Enfin ! Parlons d’autre chose. Au fait ! Ton téléphone est en panne ?

Florence      Non !

Thérèse       Il est en mode silencieux ?

Florence      Non plus !

Thérèse       Donc il fonctionne très bien ?

Florence      Oui, parfaitement bien !

Thérèse       Alors, pourquoi ne réponds-tu pas quand on t’appelle ?

Florence      Pas envie de répondre ! Pas envie de parler ! Besoin de solitude !

Thérèse        De solitude ! Certainement pas ! Dans l’état où tu es… Et puis il faut parler, évacuer ! On va t’aider à faire un trait sur ce Kylian !

Florence       Alex ! Maman, je n’ai rien à évacuer ! Je n’ai pas besoin d’aide, et encore une fois, je te répète que je n’ai pas envie de parler. Et surtout pas parler de ça avec toi !

Thérèse       Merci, c’est agréable ! Si je te dérange, dis-le clairement !

Florence       Clairement ?! Alors, je te le dis : Oui, tu me déranges ! Tu peux essayer de le comprendre ? Je voudrais – être - seule !

Thérèse        … Tu vois, tu n’es pas dans ton état normal ! Jamais tu ne m’as parlé comme ça ! Oh je ne t’en veux pas, je comprends. Tu es à bout de nerfs, Au bord du gouffre. Quand je pense à ce salaud qui t’a laissé tomber comme une vieille chaussette…

Florence       STOP !!! D’abord, je te remercie de me comparer à une vieille chaussette ! Ensuite, je t’interdis de traiter Alex de salaud, et pour terminer… (Sonnette de la porte) Qu’est-ce que c’est encore ? (Elle va ouvrir)

Scène 2 : Florence – Thérèse – Patricia – Rémy

(Entrée de Patricia et Rémy)

Thérèse       Patricia ma chérie, merci d’être venue aussi vite ! Bonjour… euh…

Rémy            Rémy ! Bonjour belle maman !

Thérèse       Oui, Rémy ! Je ne sais pas pourquoi mais ça ne veut pas rentrer.

Rémy             Ce n’est pas grave, j’ai l’habitude ! (A Florence, compatissant) Bonjour Florence, comment vas-tu ? Excuse-nous pour cette intrusion mais…

Patricia        (sèche) Oui, bon, ça va ! (Froide à Florence) Alors ?

Florence      Alors quoi ?

Patricia        Ton téléphone est en panne ?

Florence      Non !

Patricia        Il est en mode silencieux ?

Florence      Non plus !

Patricia        Donc il fonctionne très bien ?

Florence       C’est bizarre, comme parfois, on a l’impression de revivre une scène déjà vécue. Oui, mon téléphone fonctionne très bien, merci pour lui. Je te remercie de prendre de ses nouvelles. Je lui en ferai part, ça lui fera très plaisir.

Thérèse        Figure-toi que ta sœur n’avait pas envie de répondre. Pas envie de parler. Etre tranquille. Tu te rends compte ! Et nous, pendant ce temps-là, on peut s’inquiéter, c’est pas grave !

Rémy            Si Florence a envie de…

Patricia        Dis donc !

Florence      Rassure-toi, Rémy, je vais bien !

Patricia         Alors pourquoi, tu ne réponds pas ? Tu imagines l’inquiétude pour maman !?

Florence       Comme je l’ai déjà dit à maman, il est inutile de vous inquiéter. Tout va bien ! J’ai juste envie d’être un peu seule. Envie et BESOIN ! Voilà ! Maman, ce n’était pas la peine d’alerter tout le monde et provoquer un conseil de famille. Alors, maintenant que vous avez pu constater que je n’étais pas au bord du suicide, j’aimerais pouvoir aller m’habiller.

Rémy            Oui ? Allons-y ! Puisque Florence veut être seule…

Patricia         (A Rémy) Dis donc ! (A Florence) Tout va bien ! Bien sûr ! Tu trouves normal, à 2 h de l’après-midi, de ne pas être habillée ? Eh bien pour moi, non, ce n’est pas normal ! Ca commence comme ça et puis…

Thérèse        Ta soeur a raison. On commence à se laisser aller, et puis on se lave une fois de temps en temps ! Ensuite c’est l’évier qui déborde de vaisselle sale, les vêtements qui trainent, le ménage qui n’est plus fait…

Rémy            Je suis sûr que ce n’est pas le genre de Florence.

Patricia        Dis donc ! On t’a demandé ton avis !

Thérèse       Si tu avais vu le désordre quand je suis arrivée !

Florence       Oh ! Le désordre ! Pour deux revues sur la table et un manteau pas accroché dans l’entrée ! Tu parles d’un désordre !

Thérèse       Et le reste ! Le lit pas fait, et puis… (Elle fait le signe de boire)

Patricia        Quoi ?

Thérèse       Ca y est, elle a commencé !

Florence      J’ai commencé quoi ?

Thérèse       A boire !

Florence     N’importe quoi !

Thérèse        Tu ne vas pas nier ! Le verre et la bouteille, je ne les ai pas rêvés. Tu t’es mise à boire ! Du whisky !

Patricia         Non ! Ce n’est pas possible ! Il faut te reprendre ma petite. Et après tu oses dire que tu n’as pas besoin d’aide. Rémy, va vider la bouteille dans l’évier.

Rémy            Mais…

Patricia        Tu ne poses pas de question, tu fais ce qu’on te dit.

Florence       Rémy, tu ne bouges pas ! Non mais vous vous croyez où ? Et vous me prenez pour qui ? Je ne bois pas, j’ai bu UN verre ! Je n’ai pas vidé la bouteille. UN verre et alors, c’est interdit ?

Patricia        Ca commence par un et on sait comment ça finit !

Thérèse        Sous un pont ma fille, sous un pont ! Florence, on est là pour t’aider. Ecoute ta sœur. Elle est l’exemple même d’une vie réussie.

Florence       Ah non, je t’en prie, ne recommence pas avec le refrain sur la vie exemplaire de Patricia. Patricia, la fille parfaite qui fait la fierté de sa maman. Patricia, la mère accomplie qui a fait deux beaux enfants, très polis et qui travaillent très bien à l’école ! Patricia, l’épouse idéale qui « comble de bonheur » son mari !

(Regard de Patricia vers Rémy)

Rémy            J’ai rien dit !

Patricia        Eh bien, continue !

Rémy             Tout de même si je peux me permettre, il ne faudrait pas tirer de conclusions hâtives ! Moi aussi il m’arrive de prendre un verre…

Patricia        Tu penses être un exemple ?

Thérèse       Ne vous y laissez pas prendre Alain…

Rémy            Rémy ! Merci !

Thérèse        Oui, peu importe ! Comprenez que Florence vient de subir un choc terrible. On peut comprendre qu’elle soit un peu déphasée, mais de là à...

Florence       Ah oui !? Tout à l’heure, j’étais dévastée et ravagée, et maintenant je suis déphasée ! Bientôt, je serai bonne pour l’asile !

Patricia         Ce que je sais, c’est qu’on ne te laissera pas tomber. Il ne faut surtout pas que tu restes seule.

Florence      Rassurez-moi ! Vous ne comptez pas vous installer ici ?

Thérèse        Mais oui ! Voilà une bonne idée ! Bien sûr, vous avec les petits, ce n’est pas possible, mais moi, je peux. Et puis tu as une chambre libre, ça tombe bien. Tiens au fait, qu’est ce que vous avez fait des enfants ?

Rémy            Ils passent le week-end chez Mamy Huguette.

Thérèse       Chez votre mère ? Encore ! Mais vous êtes inconscients, elle leur passe tous leurs caprices. Ce n’est pas comme ça qu’on éduque les enfants. Après, ça en fait des lavettes. Pourquoi ne me les amenez-vous pas ?

Patricia        Je t’en prie maman ! Nos enfants ne sont pas des lavettes.

Thérèse        Ils vont le devenir si vous continuez à les confier à votre, Mamy Suzette.

Rémy            Huguette !

Thérèse        Si vous voulez ! (à Patricia désignant Rémy) Si tu continues ils vont devenir comme celui là. Des mous, des inconsistants, des…

Rémy             Ca va bien maintenant ! Je ne suis ni mou, ni inconsistant. Mesurez vos paroles.

Patricia        Non mais dit donc ! Comment tu parles à maman.

Rémy             Excuse-moi ma chérie, mais je commence à en avoir assez de subir les sarcasmes de ta mère. Et pour votre gouverne, chère belle maman, sachez que si les enfants vont chez ma mère, c’est parce qu’ils ne veulent plus venir chez vous. Ils en ont marre de manger des rutabagas. Ils n’aiment pas les rutabagas. Ils préfèrent les frites ou même les pâtes. Ils en ont assez de jouer au jeu de l‘oie, ils préfèrent jouer avec leurs consoles, mais chez vous c’est interdit. Et le samedi soir ils aiment bien regarder la télé et ne pas être obligés de se coucher à 19 h, après une soupe de poireaux. Voilà pourquoi ils préfèrent aller chez ma mère. Alors posez-vous les bonnes questions !

(blanc)

Patricia        Ca y est, tu as fini ?

Rémy            Pardonne-moi mon cœur, mais il fallait que ça sorte !

Patricia        On en reparlera à la maison.

Rémy            Si tu veux. Mais bordel, qu’est ce que ça fait du bien !

Thérèse        Ne soyez pas vulgaire en plus ! Bon, après cette magnifique diatribe, qu’est ce qu’on disait ? Ah oui ! M’installer ici !

Florence      N’y pense même pas ! Il n’en est pas question.

Patricia        Si c’est la solution pour te faire retrouver le droit chemin…

Florence       Le droit chemin ! Je rêve ! Vous voulez bien, juste une fois, écouter ce que je dis ? Ecouter c’est entendre ! Et entendre c’est comprendre !

Rémy            Ca c’est pas sûr !

Patricia        Dis donc !

Rémy            Vas-y Florence, on t’écoute.

Florence       Pour que vous compreniez une bonne fois pour toutes. J’ai juste envie d’être seule. Après deux ans passé avec…

Patricia        Un con !

Thérèse       Un gros con !

Florence      Non ! Je vous interdis de dire ça !

Patricia         Bien sûr, Alex était un type très bien. La preuve, il vient de te larguer !

Florence       Il ne m’a pas larguée, on s’est séparé d’un commun accord. Et puis, je peux te rappeler ce que tu me disais de lui, lors d’un repas de famille, il n’y a pas si longtemps.

Patricia        Je ne vois pas ce que j’ai pu dire. Et puis ça n’intéresse personne !

Rémy             Si, ça m’intéresse, moi ! Ce que tu peux dire est toujours très intéressant, ma chérie.

Florence       Alors, je te cite, tu m’as dit : « Tu as beaucoup de chance d’être tombée sur un type comme Alex. Et beaucoup de chance de l’avoir rencontré avant moi, sinon… »

Rémy            Ah oui ? Sinon quoi ? Ca aussi on en parlera à la maison ?

Patricia         Je n’en vois pas l’utilité et je ne me souviens pas avoir dit ça. Et puis le sujet qui nous préoccupe, le sujet, c’est Florence !

Florence       Mais merde ! Fichez-lui la paix à Florence ! Je n’ai pas à me justifier ni vous détailler ma vie ! Tu ferais mieux de t’occuper de la tienne. Y’a du boulot !

Thérèse       Mais comment tu parles à ta sœur !?

Patricia        C’est vrai ! Qui es-tu pour me parler de cette façon ? Et qu’est ce qu’elle a ma vie ? Elle est très bien notre vie. N’est ce pas Rémy ?

Rémy            Euh…

Patricia         (le coupant) Ah ! Tu vois ! Nous avons une vie parfaitement équilibrée, à tous points de vue.

Florence      C’est aussi ton avis, Rémy ?

Patricia         Bien sûr que c’est son avis ! Qu’est ce que tu espères ? Qu’il dise le contraire.

Florence       Pour ça, encore faudrait-il qu’il est la possibilité de le donner, son avis.

Patricia         Son avis, c’est le même que le mien ! Nous sommes en parfaite harmonie.

Rémy             Oui, alors, moi, je vais vous laisser, parce que je viens de me souvenir que j’ai un rendez-vous très important, alors…

Patricia         Ton rendez-vous est plus important qu’une affaire de famille, peut être ? Et puis depuis quand as-tu des rendez-vous le samedi après-midi ?

Rémy            Euh… ah on est samedi ? Je me croyais lundi.

Patricia         Voilà ! Alors ton rendez-vous attendra lundi. Alors, Florence !? Qu’est ce que tu as à reprocher à ma vie ?

Thérèse        Ta sœur prétend que tu écrases euh… celui là ! Que tu l’étouffes parce que tu décides de tout, et qu’il n’a pas son mot à dire. Tu te rends compte ?

Rémy            On devrait peut-être…

Patricia         Mais ma pauvre Florence, qu’est ce que tu sais d’une vie de couple, toi qui ne connait que des aventures sans lendemain. Comme si je martyrisais mon mari. Tu n’as pas compris que la vie est confortable pour lui !? Il n’a qu’à se laisser guider.

Florence      Dis plutôt : Etre à tes ordres. Bon petit soldat, au garde à vous !

Patricia        Se laisser aller et profiter.

Thérèse        (A Florence) Alors tu vois ! Quand tu me disais que, même au lit, c’est Patricia qui décidait. Pas du tout, il a juste à être au garde à vous !... Euh non, se laisser aller et profiter.

Rémy           Ca devient un peu gênant !

Florence       Après tout, tu fais bien comme tu veux et s’il accepte ça… Mais laisse-moi vivre MA vie comme JE l’entends. J’ai déjà dit à maman pourquoi Alex et moi nous nous sommes séparés, je ne vais pas recommencer, elle te racontera. Je voudrais simplement que vous compreniez que tout va bien. Après deux ans de vie de couple avec ses bons moments, mais aussi ses contraintes, je souhaiterais, pendant un temps, vivre pour moi. Rien que pour moi. Faire ce que j’ai envie, quand j’en ai envie. C’est trop demander ?

Rémy            C’est très clair ! On va te…

Patricia et Thérèse          Dis donc !

Rémy            Mais, si Florence souhaite rester seule… ! Allez viens !

Patricia        Tu me donnes des ordres maintenant ?

Rémy            Oh non ! Tu fais ce que tu veux !

Thérèse        Allez-y, vous, puisque vous êtes pressé ! Partez ça nous fera de l’air ! Je ramènerai Patricia !

Rémy             Vous la ramènerez ? Et comment ? Je vous rappelle, très chère belle-mère, que vous n’avez jamais réussi à avoir votre permis.

Thérèse       Euh... je la ramènerai par le métro.

Patricia         Enfin maman ! Je peux très bien rentrer toute seule. Tu ne vas pas me prendre par la main comme quand j’avais 5 ans.

Thérèse       Et pourquoi pas ? Alors voilà ! Toi aussi tu te rebelles ? Tu vois Florence ! Tu vois ce que tu fais ? Tu déteins sur ta sœur. Je préfère m’en aller ! Heu… machin ! Vous me déposez en passant ?

Rémy            Vous ne préférez pas prendre le métro ?

Patricia        Allons-y alors ! Florence, fais quand même attention à toi.

Rémy            N’hésite pas, si tu as besoin de quoi que ce soit, je suis là.

Patricia        On est là !

Florence       Merci ! Et une dernière fois, pas d’inquiétude, tout va bien. Oh Rémy, j’ai un petit service à te demander. Si tu pouvais passer à l’occasion, une petite fuite d’eau à l’évier, si tu pouvais regarder…

Rémy            Pas de soucis, je passerai !

Patricia        Oui, ON passera !

(On sonne)

Rémy            Toi qui désires rester seule…

(Florence va ouvrir et revient avec Raphaël)

Scène 3 : Florence – Thérèse – Patricia – Rémy – Raphaël

Patricia        Manquait plus que celui-là !

Raphaël        Désolé Florence, je ne savais pas que tu avais de la visite. Je repasserai.

Florence      Non, reste, ils partaient ! Tu connais Patricia.

Raphaël       Oui, on se connaît ! Bonjour Patricia !

Florence      Ma maman ! Tu t’en souviens ?

Raphaël       Très bien oui !

Florence       Tu te rappelles maman ? Raphaël… Raphaël Delafond. Mon premier amoureux. Mon premier baiser sur la bouche, c’est lui ! On avait que 7 ou 8 ans mais je m’en souviens encore.

Florence      Et Rémy, le mari de Patricia !

Raphaël       Oui je connais aussi !

Patricia        Mais comment le connais-tu ?

Raphaël        Heu… Enfin non, je veux dire… je ne le connais pas mais… je me suis bien douté que c’était ton mari. Bonjour Monsieur.

Florence       Rémy, je te présente Raphaël, un copain d’enfance à Patricia et moi.

Rémy            Monsieur !

Thérèse        Le petit Delafond ! C’est vrai que Patricia vous en a fait voir de toutes les couleurs. Ca me fait plaisir de vous revoir. Pas toi Patricia ?

Patricia        Tu sais, c’était surtout un copain à Florence, pas vraiment à moi !

Thérèse        Oui, je me souviens, le petit Delafond ! Tu l’appelais « cuvette de chiotte». A cause de Jacob et Delafond.

Raphaël        Elle m’a, également, jeté beaucoup de cailloux. Poussé dans les orties ou dans les ronces dès qu’elle en avait l’occasion. Elle m’a même fait tomber de vélo. J’en garde d’ailleurs, deux jolies cicatrices. Une à la cuisse et l’autre à la fesse droite. Il a fallu recoudre ! Tu veux voir Patricia ? Et tu m’as fait subir bien d’autres supplices encore. Déjà à 8 ans tu ne m’aimais pas et ça a duré toute notre scolarité. Je me suis toujours demandé pourquoi. Enfin ! C’est du passé ! Tu sais qu’on travaille dans le même quartier et on prend le même bus.

Patricia        Pas fait attention !

Thérèse       Et vous n’êtes jamais allé lui parler ?

Raphaël       Non ! J’avais trop peur qu’elle me fasse tomber du bus !

Thérèse       Et toi, Patricia, tu ne l’as jamais remarqué.

Patricia        Encore faudrait-il qu’il soit remarquable !

Raphaël        Et pan ! Prends ça dans ta tête ! Je vois que tu m’apprécies toujours autant. Pourtant je ne t’ai jamais rien fait. Il faudra m’expliquer un jour.

Patricia        Laissons le passé où il est, on ne peut pas revenir dessus.

Florence       Raphaël et moi sommes toujours restés très bons amis et on se voit très régulièrement.

Thérèse        (À Florence en aparté avec un sourire complice) « très bons amis, très régulièrement » ! Hum hum ! Je comprends maintenant pourquoi tu souhaitais rester seule. Il a l’air bien ce garçon !

Florence       Oh maman ! Raphaël est juste un copain, alors ne vas pas imaginer…

Thérèse        Mais tu fais ce que tu veux. Tu n’as pas de comptes à me rendre. Rémy) Alors on y va ? Je vous attends ! Florence a besoin de… solitude (Ils sortent. Rémy d’abord suivi de Patricia et enfin Thérèse. Avant de sortir Thérèse fait un signe à Florence en montrant Raphaël) Vas-y ma fille ! Fonce ! C’est peut-être le bon !

Scène 4 : Florence – Raphaël

Florence      Ouf ! Merci d’être arrivé !

Raphaël       Des problèmes ?

Florence       Non, pas vraiment ! Ils s’inquiètent pour moi et pensent que je suis au 36e dessous.

Raphaël       A cause de…

Florence       Oui ! Je peux les comprendre. Ils sont gentils, très gentils, mais… trop gentils parfois. C’est surtout maman qui s’inquiète. Elle voudrait bien me voir casée définitivement. Comme ma sœur. La référence ultime. Avec une bonne petite vie, bien sage, bien rangée, bien tranquille.

Raphaël        Je vois le genre. Un travail sûr, un joli pavillon en proche banlieue, deux enfants, et un chien, les vacances sur la côte d’azur, tous les ans au même endroit.

Florence       C’est exactement ça !... (Pour plaisanter) Tu surveilles ma sœur ou quoi ?

Raphaël        Hein ?... Moi ?... Oh non… enfin… Je sais où elle habite et deux-trois trucs mais … Ne me regarde pas comme ça ! Tu sais que j’ai toujours eu un faible pour ta sœur.

Florence       Oui, je sais, tu me l’as déjà dit ! On se demande bien pourquoi d’ailleurs ! Vu la façon dont elle te traite.

Raphaël       Ca ne se commande pas ces choses là.

Florence       Tu m’as même fait promettre de ne jamais lui en parler. Mais je ne pensais pas que tu allais jusqu’à l’espionner.

Raphaël        Oh l’espionner !... Non… Enfin… je dois bien avouer que souvent, en rentrant du boulot, alors que je dois descendre du bus, trois arrêts avant elle, eh bien… je ne descends pas. Juste pour le plaisir de pouvoir la regarder un peu plus longtemps… C’est con hein ! Surtout qu’il n’y a pas de bus dans l’autre sens, et que je dois revenir à pied.

Florence       Non c’est pas con… Enfin si, c’est con ! Parce que c’est surtout te faire du mal pour rien… Je n’en reviens pas ! Tu en es réellement amoureux ? Depuis toutes ces années ? Mais pourquoi ne jamais lui avoir avoué ?

Raphaël       Ben… d’abord, elle est mariée… alors ça fait déjà un obstacle.

Florence      Rassure-toi, pas pour ma mère !

Raphaël        Pour moi, c’en est un ! Et puis elle m’a toujours détesté alors… Ce n’est certainement pas maintenant que…

Florence       Mais, quand on était mômes, c’est déjà d’elle dont tu étais amoureux ?

Raphaël       Oui !

Florence      Pourtant c’est avec moi que tu jouais et c’est moi que tu as embrassée. Pourquoi ?

Raphaël       Pour la rendre jalouse. Elle a toujours voulu ce que tu avais. Je me suis dit que ce serait pareil avec moi. Mais non ! Ca n’a pas marché !

Florence      Ben dis donc ! A huit ans, tu étais déjà un véritable petit stratège.

Raphaël        Tu connais le proverbe : « la valeur n’attend pas le nombre des années », eh bien c’était vrai pour moi. Petit j’étais déjà très brillant ! Brillant mais chétif. Trop chétif pour ta sœur. Dès qu’elle pouvait me faire mal, elle ne se privait pas. Allez, n’en parlons plus, c’est du passé.

Florence      Un passé qui m’a l’air d’être, tout de même, bien présent !

Raphaël        Et le présent est imparfait. Assez parlé de ta sœur. Toi, comment ça va ? Tu te fais à ta vie de célibataire ? Au fait, j’ai vu Alex, il te fait un bisou.

Florence      C’est gentil ! Tu lui en referas un quand tu le reverras.

Raphaël        Oui heu, j’aime bien Alex, mais on ne va peut-être pas aller jusque-là ! Je lui dirai que tu lui en fais un. Ca ira bien. Alors ?

Florence       Ca va ! Un peu bizarre de reprendre une vie de célibataire, mais je m’y fais plutôt bien. Et toi ? Au fait, tu n’avais pas un examen à faire chez le médecin ?

Raphaël       Si !

Florence      Alors ? Raconte !

Raphaël       Pas très envie d’en parler.

Florence      Tu me fais peur là. Tu n’as rien de grave au moins ?

Raphaël        Ah non, ne t’inquiètes pas. Ca va !... Enfin ca va… Disons que la santé, ça va mais… ma dignité en a pris un coup.

Florence      Je ne comprends pas.

Raphaël        Pour tout te dire, j’avais des problèmes urinaires. Quand j’ai expliqué les symptômes au médecin, il m’a demandé de me déshabiller. Enfin le bas. Tout le bas. Déjà ça, crois moi, c’est gênant. Il m’a fait m’allongé… replier les jambes… et il m’a… il m’a… enfin tu vois… il m’a mis un doigt… dans le…

Florence      Ah oui, il a examiné ta prostate. Ca va il n’y a pas de quoi…

Raphaël       Si ! Si, il y a de quoi ! Je peux te dire que c’est très humiliant.

Florence       Tu sais, nous aussi les femmes, avons des examens à faire qui ne sont pas drôles. Quand on te fait mettre les seins sur une plaque glacée et qu’on vient te les écraser autant que possible. Ce n’est pas très agréable non plus. Moi, la première fois, j’ai cru que j’allais ressortir avec deux crêpes. Et je ne te parle pas quand on doit aller chez le gynéco.

Raphaël        Oui, j’imagine. Non, je ne veux pas imaginer ! On peut parler d’autre chose ? Mais je vois que tu es en peignoir, je te dérange ?

Florence       J’allais m’habiller quand ils sont arrivés. Je voulais aller faire un peu de shopping.

Raphaël       On peut y aller ensemble si tu veux ! Je n’ai rien à faire.

Florence       Non, excuse-moi Raphaël, ne le prend pas mal, mais j’aimerais avoir un peu de temps rien qu’à moi.

Raphaël        Pas de soucis ! (Mimant des sanglots) Alors, toi aussi, tu me repousses ! (Changeant de ton pour devenir comédien dramatique surjouant) Laisse-moi ! Laisse-moi, seul ! Je vais aller pleurer mon désespoir et noyer ma déception, dans de l’alcool de mauvaise qualité, au fond d’un bar sordide, qui pue la fumée, la sueur et la tristesse. Peut-être une poivrote assoiffée, mais sensible, acceptera-t-elle d’écouter la lamentable histoire de ma vie de paumé rejeté, délaissé, désabusé. Adieu Rome ! Adieu Venise ! Salut… Florence !

Florence       (Riant) T’es con ! Salut pauvre mec ! (Il sort). Bien, je vais peut-être, enfin, pouvoir passer une tenue décente ! (Elle se dirige vers la chambre quand on sonne à nouveau) Ah non !

Scène 5 : Florence – Charlotte

Florence       Charlotte !? Décidément vous vous êtes tous donné rendez-vous ici !

Charlotte     Quel accueil ! Cache ta joie de me voir !

Florence       Excuse-moi ! Je me demande quand même si j’arriverai à m’habiller aujourd’hui. Toi aussi tu viens prendre de mes nouvelles ? C’est gentil, merci tout va bien.

Charlotte     De toute façon, toi, tu vas toujours bien ! C’en est déprimant ! Eh bien non, désolée, mais je ne viens pas prendre de TES nouvelles. Par contre, je peux te donner des miennes.

Florence      Qu’est-ce qui t’arrive encore ?

Charlotte     Pourquoi « encore » ?

Florence       Je t’ai toujours connue en galère. Soit c’est galère de boulot, soit c’est galère de fric, soit c’est galère d’appart, soit c’est galère de mec.

Charlotte     Oui c’est vrai ça ! Depuis 15 ou 16 ans qu’on se connait, j’ai toujours été en galère ! Je me demande si ce n’est pas toi qui me portes la poisse.

Florence      Alors c’est quoi aujourd’hui ?

Charlotte     Ben… d’abord galère de mec et ensuite galère d’appart. A cause de Fredo ! Déjà, depuis quelques temps, ça n’allait pas fort avec Fredo ! Mai là, c’est parti en vrille pour une histoire de papier toilette. Je ne sais pas ce qu’il en fait, il doit le bouffer, ou je ne sais pas, mais y’en a jamais ! Alors, moi, je lui fais remarquer… Bon, tu me connais, moi la diplomatie, c’est pas trop mon truc, alors peut-être que je suis montée un peu vite dans les tours, mais le P.Q., mi, quand y’en a pas, ça m’énerve ! Donc, j’ai un peu braillé, tu sais ce qu’il me répond cet enfoiré ? « Si j’utilise trop de papier, c’est peut-être parce que tu me fais trop chier ! ». Alors là, je te raconte pas comment que la pression elle m’est montée jusqu’aux narines ! Je commence à gueuler et tu sais quoi ? Le voilà qu’il me répond ! Alors je te passe les insultes et les noms d’oiseaux, je ne savais pas qu’il avait autant de mots pour me définir ! Et finalement, sans doute emporté par son élan, au fil de la conversation, il finit par me dire qu’il se tape la serveuse d’un bar où qu’on va souvent. Une espèce de grande seringue qui ressemble à rien ! Elle est tellement maigre qu’on a presque envie de lui souffler dedans pour la regonfler. On y voit à travers ! Bon passons ! Moi, quand j’ai entendu ça, mon sang n’a fait qu’un tour ! Mon poing aussi ! Il l’a pris en plein dans sa tronche, mais violent ! J’ai vu des trucs voler, je pense que c’étaient des dents. Et ça, il a pas aimé ! Du coup, il m’a foutue à la porte ! Alors moi, j’étais là sur le palier à brailler comme un veau quelques gentillesses, tu penses. Il a fini par rouvrir la porte, alors, moi, je me suis dit :  C’est bon, il va s’excuser ! Je t’en foutrais, il m’a balancé toutes mes affaires dans la tête.

Florence      Ah merde ! Mais qu’est-ce que tu vas faire ? Tu vas aller où ?

Charlotte     Ben… là, comme ça, je dirais bien que j’ai un plan B, mais… je ne suis pas certaine que ça te plaise.

Florence      ?... Non ?!... Ton plan B, c’est pas… c’est pas celui auquel je pense ?

Charlotte     Ca dépend à quoi tu penses !

Florence      Tu voudrais t’installer chez moi ?

Charlotte     (La serrant contre elle) Oh merci c’est trop gentil ! Je n’osais pas te le demander ! Mais puisque tu le proposes ! D’accord ! T’es vraiment une super copine. On peut toujours compter sur toi. J’prends mes affaires. (Elle va à la porte et revient avec un sac-poubelle)

Florence      Mais… ce n’était pas une proposition, c’était une question.

Charlotte     T’inquiète pas, je ne prends pas de place. Tu ne verras même pas que je suis là. Et puis c’est juste quelques jours, le temps de me retourner. Au plus, quelques semaines.

Florence      Mais…

Charlotte     Et puis tu as deux chambres, ça tombe bien ! C’est dommage d’avoir une chambre qui ne sert à rien ! T’es vraiment trop chouette !

Florence      En même temps, je n’ai pas vraiment le choix.

Charlotte     C’est ça, ou la rue ! Et je suis certaine que tu te ferais du souci pour moi et ça t’empêcherait de dormir. Du coup je te rends service. Non, ne me remercie pas, c’est normal. Entre bonnes copines, si on ne se rend pas service, qui le fera. Comme disait Jean.

Florence      Hein ?

Charlotte     Jeu de mots. Fera comme disais Jean. Jean Ferrat ! Jean Fera ce qu’on lui dira de faire. Ou Jean s’ marrait… pendant que Simone s’ignorait. J’en connais plein, tu vas voir, on va bien se marrer.

Florence      Oui, je vois ! Alors, si je comprends bien, avec Fredo, c’est bien fini.

Charlotte     Bien fini, bien fini, on ne peut pas dire ! Mais c’est fini. Pourtant on s’entendait bien, quand on ne s’engueulait pas. Ah ça, on peut dire que j’en aurai fait pour lui, et voilà la reconnaissance. Bon, je vais aller installer mon petit barda. (Elle va direction sortie chambre, se retourne) C’est quelle porte ?

Florence      La deuxième. La première c’est ma chambre.

Charlotte     OK chef ! Ah ! Encore un truc. Demain c’est dimanche, pas de soucis mais lundi matin tu vas bosser ?

Florence      Oui, comme tous les jours !

Charlotte     Moi je ne bosse pas, je suis en récup. Essaie de ne pas faire trop de bruit en te levant. Merci ! Allez, j’y vais ! (Elle sort)

Charlotte OFF        Wah ! Y’a même une télé ! Elle fonctionne ?

Florence      Oui !

Charlotte OFF Super ! Lundi il y a un match de foot que je ne voudrais pas            rater.

Florence      Dire que je rêvais d’un peu de solitude. (Elle reste un temps, stupéfaite)... Je vais peut-être reprendre une douche. Mais bien glacée celle-là !

NOIR

Acte 2

Scène 1 : Charlotte – Max

Charlotte     Viens, entre ! (Elle entre suivie de Max. Il a un sac à dos et une vieille guitare. Il est très négligé)

Max               C’est sympa ! Ah on peut dire que j’ai du bol ! J’te rencontre, ça flash direct entre nous et tu m’amènes chez toi. D’habitude, je rencontre que des meufs en galère, comme moi. Et celles là, crois-moi, je les fuis comme la peste, ça n’amène que des embrouilles. Et là, je tombe sur toi ! T’as vraiment l’air d’être une fille géniale. En plus, t’es une vraie bombe !

Charlotte     Une bombe, non, il ne fait rien exagérer ! Je suis très bien, c’est vrai, mais une bombe… Et pour ce qui est d’être une fille géniale, attends de me connaitre un peu mieux. C’est vrai, je suis gentille, mais j’ai mon petit caractère.

Max               (l’enlaçant) Moi je suis sûr que t’es géniale ! (Elle lui tend ses lèvres, il la relâche) C’est chouette chez toi, cool !

Charlotte     Chez… Eh oui ! Oh, c’est simple mais on s’y sent bien. J’espère que tu t’y plairas.

Max               Faudrait être difficile ! Ca va me changer de la rue où je vis depuis 3 mois.

Charlotte     C’est sûr ! Euh… il faut juste que je te dise un truc, quand même… je ne vis pas seule, ici.

Max               Ah merde ! T’as un copain !

Charlotte     Non, une copine !

Max               Ah ouais !? T’es recto verso !?

Charlotte     Recto verso ?

Max               Ben ouais, j’veux dire… on se roule des gamelles à s’en décrocher le dentier et tu me dis que t’as une copine. T’es des deux bords, quoi ! Recto verso !

Charlotte     Ah non ! Quand je dis copine, c’est dans le sens « amie », pas « petite amie » !

Max               Aaah ! OK ! C’est dommage, ça aurait pu être sympa ! Un plan à trois !

Charlotte     Hein ?

Max               Oui, non , je déconne !... et puis en même temps… Elle n’est pas là ta copine ?

Charlotte     Non, elle travaille aujourd’hui.

Max               Elle fait quoi comme boulot ?

Charlotte     Elle bosse dans un cabinet d’avocats.

Max               Ah ouais ! C’est pas n’importe qui ! Et pis, ça doit gagner un max ! Et… comment qu’elle est ?

Charlotte     Très sympa ! Mais là, elle vient de rompre avec son copain…

Max               Ah ouais, j’ai compris ! Toi, tu l’héberges le temps qu’elle se remette, pour ne pas la laisser seule.

Charlotte     Heu… voilà ! On peut dire ça, comme ça !

Max               T’es un vrai petit ange, toi !

Charlotte     C’est mon côté Mère Thérésa.

Max               (il la prend dans ses bras) J’ai une grosse envie de mieux la connaitre cette Mère Thérésa. Un peu plus en détail, si tu vois ce que je veux dire !

Charlotte     L’idée ne me déplait pas du tout ! Mais avant, j’aimerais te connaitre un peu mieux. Ca fait à peine deux heures qu’on s’est rencontré alors… Parle-moi un peu de toi, de ta vie d’avant, comment tu t’es retrouvé à la rue, tout ça.

Max               Pfff ! Tout ça, c’est à cause d’une meuf ! Amélie que c’était ! Elle m’en a fait baver, si tu savais !

Charlotte     Vas-y, raconte !

Max               Une jalouse, tu peux pas savoir ! Une malade de jalousie ! Je ne pouvais pas regarder une autre fille sans qu’elle s’imagine des trucs. C’était pénible !

Charlotte     Elle avait peur que tu la trompes ?

Max               Voilà ! Tout le temps ! Toujours à imaginer je ne sais pas quoi !

Charlotte     Je comprends que pour toi, ça devait être invivable d’être soupçonné sans arrêt, alors que tu étais fidèle !

Max               Ah non, je la trompais, mais elle n’avait aucune preuve ! Elle e aurait eu des preuves, bon, d’accord, elle aurait des raisons de m’en vouloir ! Mais là, rien ! Juste, elle PENSAIT, que je la trompais. Tu imagines ça ? Faire des scènes à ton mec, juste parce que tu PENSES qu’il POURRAIT te tromper !? Et tous les jours, c’étaient des pleurs et des pleurs à n’en plus finir ! A côté, les grandes eaux de Versailles, c’est un pipi de chat ! En deux jours elle te remplissait toutes les nappes phréatiques de la région.

Charlotte     Oui, mais je peux comprendre. S’imaginer que ton homme sort peut-être des bras d’une autre, il y a de quoi pleurer.

Max               Mais sans preuve !... On ne peut pas se mettre dans des états pareils sans avoir de certitudes !

Charlotte     Mais… tu la trompais souvent ou ça a été juste une fois, comme ça… ?

Max               Tout le temps ! Faut comprendre aussi. Elle bossait. Elle avait un bon job, bien payé. Du coup, moi, je bossais pas, c’était pas la peine. Alors il fallait bien passer le temps. Du coup, je trainais un peu et en trainant, on fait des rencontres. Et puis c’est de sa faute aussi ! Imagine ! Tu vis avec une meuf qui passe son temps à chialer. Elle part au boulot le matin, elle chiale. Elle rentre le soir, elle chiale. C’est démoralisant à force ! Alors toi, t’as besoin de réconfort. Tu crois que ça me faisait plaisir de la voir chialer tout le temps ?

Charlotte     C’est parce qu’elle t’aimait ! Elle avait peur de te perdre. Elle avait du chagrin rien que d’y penser. Moi aussi quand j’ai du chagrin, je pleure… enfin, je pleure et après je frappe. Maison n’est pas toutes pareilles. Elle te frappait ?

Max               Non, non ! Juste elle pleurait ! Mais, tu comprends, tous les jours, tous les soirs… Le nombre de soirées qu’elle à pu me gâcher !

Charlotte     Et donc, tu es parti !

Max               Non ! Elle m’a jeté à la rue ! Oui parce que j’habitais chez elle…

Charlotte     Et toi, tu n’avais pas un chez toi ?

Max               C’était pas la peine puisque elle, elle en avait un !

Charlotte     Mais pourquoi elle t’a jeté ? Elle a trouvé des preuves ?

Max               Non, elle a rencontré un autre type. Un copain à moi, en plus. Patrick Labitant qu’il s’appelle. Labitant ! Un bel enfoiré celui là ! Il me pique ma meuf sous prétexte que j’avais couché avec la sienne ! Aucun sens de l’amitié ! Mais, crois, aujourd’hui, il le regrette !

Charlotte     Ah oui, pourquoi ?

Max               Parce que l’autre, elle chiale toujours ! Et pourtant, Labitant, il ne la trompe même pas. Elle lui fait des scènes, encore pire qu’à moi ! Du coup, il s’est mis à picoler Labitant. C’est devenu une vraie loche. Alors l’autre, elle chiale encore plus parce qu’il boit.

Charlotte     Pour elle ça doit être dur, si Labitant boit ! Et après  tu as fait quoi ?

Max               Après, j’ai rencontré Sophie. Une petite brune qui était serveuse dans un bar. J’ai emménagé chez elle. Mais ça n’a pas duré.

Charlotte    Oh ben t’as pas de chance ! Qu’est ce qui s’est passé ?

Max                   Je me suis aperçu qu’elle ne faisait pas que servir des boissons dans son bar. Non, elle servait… enfin elle servait un peu à tout. Et à tout le monde, si tu vois ce que je veux dire. Et puis surtout, elle était maquée, à un type du genre qui avait des bras aussi gros que mes cuisses. Alors, tu comprends, je me suis tiré vite fait de chez elle. Pas envie de me faire fracasser la tête. Et puis quand elle avait servi toute la journée, et qu’elle rentrait le soir, j’avais pas trop envie de me taper des restes.

Charlotte      T’as quand même eu une drôle de vie !

Max                   Après, j’ai été en jachère un moment, avant de rencontrer Julie. Alors elle, ça a été différent. Le grand amour !

Charlotte      Ca a duré longtemps avec elle ?

Max                   Deux jours ! Elle m’a surpris au lit avec Marie. C’était le jour de mon anniversaire. Je m’étais offert un petit cadeau. Notre idylle s’est effondrée d’un seul coup. Un coup de pelle. Sur la tête. J’en ai vu 36 chandelles.

Charlotte      Le jour de ton anniversaire, c’est normal !

Max                   Alors je me suis installé chez cette Marie. Mais elle habitait vers le zoo de Vincennes. Qu’est ce que j’ai pu m’ennuyer. Y’a rien là-bas ! A part le zoo, y’a rien. C’est un vrai désert. J’étais tout seul toute la journée à tourner en rond, et personne avec qui parler. Elle n’avait même pas la télé. Elle disait que la télé çà abruti les gens. Par contre, elle avait des bouquins. Plein de bouquins. Des machins sur la psychologie, la philosophie ou sur la mythologie. J’y comprenais rien. Du coup je passais toutes mes journées au zoo. J’espérais y faire des rencontres mais au zoo, tu rencontres qui ? Des vieux où des femmes avec leurs maris et les gosses. Non, le zoo c’est pas un bon terrain de chasse. Du coup,  et je parlais aux animaux. A la fin, j’y passais tellement de temps que les autres visiteurs ne venaient plus pour les animaux, ils venaient pour moi ! Ca pouvait pas durer, et moi j’avais besoin de respirer alors j’ai quitté Marie.

Charlotte      Pourtant on respire au zoo de Vincennes. Ca change de Paris.

Max                   Non, au zoo de Vincennes, tu respires pas sain. Tu respires les odeurs d’urine et e crottin.

Charlotte      Oui mais au moins, c’est naturel !

Max                  Non ! Pour un parisien c’est pas naturel. C’est un cauchemar. Les odeurs de Paris me manquaient trop. Je rêvais de retrouver les effluves des pots d’échappement. Les relents de dessous de bras dans le métro à l’heure de pointe. Le parfum des poubelles après huit jours de grève. Alors je suis revenu à la vie. La vraie. Et c’est là que j’ai rencontré Elodie. Mais elle, elle n’avait aucune morale. Elle me faisait cocu mais je m’en suis vite douté. Dès qu’elle à commencé à me sortir les «Pas ce soir, je suis fatiguée » ou « Pas maintenant, j’ai la migraine ». Là, je me suis dit qu’il y avait un loup. Et quand je lui en ai parlé, elle s’est fâchée en disant que si je ne lui faisais pas confiance, on n’avait rien à faire ensemble. Hop ! A la rue le Max ! Viré ! Mais dans le fond, c’était pas plus mal, elle m’a rendu service.

Charlotte      Comment ça ?

Max                   Si tu réfléchis bien, une bonne femme qui trompe son mec et qui le largue. Elle le débarrasse d’une femme infidèle.

Charlotte      Oui, c’est pas faux ! Mais dis moi, Amélie, Sophie, Julie, Marie, Elodie, t’as pas de chance avec les prénoms en « ie ».

Max                   Eh non ! C’est pour ça, faut que je change. Avec une Charlotte, j’espère que je ne risque rien.

Charlotte      C’est sûr. Mais si ça doit durer entre nous, fait gaffe quand même. Moi je suis une sanguine. Si jamais tu me fais des misères, je te déglingue la tête.

Max               T’inquiète ! C’est pas des misères que je veux te faire, bien au contraire. A propos de ça … on cause mais on pourrait peut-être…

Charlotte     Ben dis donc, tu ne perds pas de temps, toi ! Avant, j’aimerais prendre une douche et… je pense que tu devrais en prendre une aussi.

Max              Je pue tant que ça ? (Charlotte fait une grimace) Alors allons-y ensemble !

Charlotte      Ah non, désolé ! J’ai horreur des douches à deux. Mais après…

Max              (se rapprochant) Oui ? Qu’est ce qu’on fera après ?

Charlotte    (même jeu encore plus) Après hum… après oh…

Max              (toujours plus) Oh oui, après… après la douche…

Charlotte    Oui, on… (vive) Non ! Y’a le match, j’ai failli oublier !

Max              Quel match ?

Charlotte    Le match de foot que je ne veux pas rater ! Alors le après ce sera après le foot. T’aime le foot toi ?

Max              Bof ! Tu sais, moi, les mecs en short qui courent après un ballon et qui se font des papouilles quand ils ont mis un but, j’ai jamais bien compris l’ambiance…

Charlotte    Je t’expliquerai ! Je vais prendre ma douche, j’ai tout juste le temps. Et si le foot ne t’intéresse pas, ça te laissera tout le temps pour aller faire un brin de toilette. (Elle sort salle de bain)

Max              Si c’matin, on m’avait dit que j’passerais la nuit dans un lit, avec des draps propres… et une nana pas farouche… J’aurais pas misé 100 balles là-dessus ! Bon, en même temps, les 100 balles j’les ai pas ! C’est pas tout ça, mais il fait un peu soif ! (Il voit la bouteille de whisky, la prend et boit à la bouteille) Tout juste le carburant qu’il fallait ! J’vais en profiter pour visiter mon nouveau logement. (Il sort direction chambres)

(On sonne – un temps puis Thérèse entre)

Scène 2 : Max – Thérèse

Thérèse        Florence !... Florence !... Où est-elle encore ? (Elle remarque le sac et la guitare de Max) Qu’est ce que c’est que ça ? (Max revient bouteille à la main)

Max               Ca, c’est à moi ! On touche pas !

Thérèse        Oh ! Vous m’avez fait peur ! Mais qui êtes-vous ? Qu’est ce que vous faites ici ? Ma fille n’est pas là ?

Max               Votre fille ? Ah, vous êtes la mère de… Elle est sous la douche.

Thérèse        Vous êtes, Monsieur… ?

Max               Oui, je confirme, je suis monsieur !

Thérèse        Je vois bien que vous n’êtes pas une jeune fille. La question était : Qui êtes-vous ?

Max               Ah ! Max ! Disons que je suis… le petit copain de…

Thérèse        Le petit copain de… ! Vous !? Mais… ce n’est pas possible ! Je rêve !

Max               Et pourtant, c’est comme je vous l’dit ! C’est vrai, je n’suis pas super présentable ! J’ai besoin d’une douche, moi aussi, et ça fait un moment que j’ai pas changé de fringues, alors forcément, ça daube un peu.

Thérèse        Et… vous sortez… d’où ? Enfin… je veux dire… excusez mon étonnement, mais… ma fille ne m’a pas habituée à fréquenter... des gens… comme vous.

Max                           C’est sûr, je suis pas sous mon meilleur jour ! Je viens de la rue, SDF depuis 3 mois.

Thérèse        Ah je comprends ! Mais… ma fille et… vous, comment ? Pourquoi ?

Max                           On s’est rencontrés c’t après-midi ! J’essayais de gagner un peu d’ tune pour pouvoir bouffer. Je joue de la guitare dans le métro. Station République. Je jouais, vot’ fille à écouté un moment et pis après, on a discuté. Et j’sais pas, y’a eu comme un flash entre nous et voilà. Quand elle a su que je dormais dehors, elle m’a proposé de venir ici. Tu penses que j’ai pas dit non ! Mais attention, pas de fausse interprétation. C’est pas parce que je viens de la rue et que j’ai pas de boulot que je suis un traine savate.

Thérèse        Rassurez-vous, je n’interprète pas. Je ne fais que constater.

Max                           Trop souvent, les gens ont tendance à interpréter des trucs et puis c’est pas ça du tout. Les choses ne sont pas du tout ce qu’ils pensent. Pour le même truc, plusieurs personnes vont avoir une interprétation différente.

Thérèse        Oui, c’est vrai, mais là…

Max                           Non, non, il faut se méfier des interprétations. Tiens, vous connaissez l’histoire du scientifique fou qui rencontre un dompteur de puces ?

Thérèse        Euh… non !

Max                           C’est pour vous donner un exemple d’interprétation. Alors c’est un scientifique dingo qui veut étudier les puces. Alors il va trouver un dompteur de puces et il lui dit : « Elles sautent vos puces ? » « Bien sûr ! » répond le dompteur. « Mais comment vous faites pour les faire sauter ? » demande le scientifique dingo. « Il suffit de leur dire de sauter et elles le font » répond le dompteur. Et pour le prouver, il met une puce sur la table et lui dit « Allez saute ! ». Et la puce saute. « Vous voyez, quand on lui demande de sauter, elle saute ». Alors le scientifique dingo coupe une patte de la puce et lui dit « Saute ! ». La puce, elle saute. Il coupe une deuxième patte « Saute ! ». La puce saute. Il coupe une troisième patte, « Saute ! ». La puce saute. Il coupe la dernière patte, « Saute !». La puce ne saute pas. Alors le scientifique dingo conclut : «Si on demande à une puce de sauter, elle saute, mais si on lui coupe les pattes, elle ne saute plus. On peut donc en conclure que les puces deviennent sourdent quand on leur coupe les pattes ». (Long blanc) Vous voyez, faut faire gaffe aux interprétations.

Thérèse        Je vois, je vois !

Max              Forcément la puce elle ne peut pas sauter, vu qu’elle n’a plus de patte. Mais le gars, lui, il croit que la puce ne saute pas parce qu’elle a les oreilles aux bouts des pattes.

Thérèse       Oui, merci mais j’avais compris ! (En aparté) Ma fille est devenue folle. Qu’est ce qu’elle fait avec ça ! Et en plus, elle le fait venir chez elle, alors qu’elle le connait à peine. Et puis quelle dégaine il a, et quelle odeur !

Max              Mais asseyez-vous, ma bonne dame, elle devrait pas en avoir pour longtemps.

Thérèse       Heu non… merci, je vais y aller. Je venais juste prendre de ses nouvelles mais, maintenant, j’en ai. (En aparté) Elle a complètement pété les plombs ! Faut que je prévienne Patricia.

(On sonne – personne ne bouge – un temps – on sonne à nouveau)

Max              Faudrait peut-être aller ouvrir, non ?

Thérèse       Euh… oui !

Max                           … Ce s’rait mieux si c’était vous. Moi j’suis nouveau alors c’est sûrement quelqu’un que j’connais pas.

Thérèse       Oui, j’y vais ! (Elle sort – Max s’assied et prend une revue)

Thérèse OFF   Tiens, c’est vous ? Qu’est-ce que vous faites là ? (Elle rentre                                     suivie de Rémy. Il ne voit pas tout de suite Max)

Scène 3 : Max – Thérèse – Rémy

Rémy                        Eh bien… c'est-à-dire que je venais voir comment allait Florence et comme je passais dans le quartier… Je ne pensais pas vous trouver là. (Il voit Max) Qui est-ce ?

Thérèse        Je suis tellement retournée, je n’ose même pas le dire.

Rémy            Monsieur, vous êtes ?...

Max                           Bien ! Je suis bien, merci ! Il est très confortable ce canapé ! Ca change des cartons !

Rémy                        (regard étonné vers Thérèse) Qu’est ce qu’il dit ?

Thérèse        Ah oui, ça surprend hein ! Il m’a fait à peu près la même chose. Il faut lui poser la question une deuxième fois mais de manière différente pour qu’il comprenne.

Rémy            Je voulais dire, qui êtes-vous?

Max               Aaaah ! Moi, c’est Max ! Salut !

Thérèse        C’est… le nouveau petit copain de…

Rémy            (un temps) Nooon !

Thérèse        (résignée) Si !

Rémy            (un temps) Nooon !

Thérèse        (résignée) Si !

Rémy            (un temps) Nooon !

Thérèse        (résignée) Si !

Max                           Eh ben y vous faut du temps pour comprendre vous ! Ben oui, le p’tit copain de la fille qui habite ici, c’est moi !

Rémy            (même ton) Nooon !

Max               (même ton que thérèse) Si ! Et vous, vous êtes ?

Rémy            Son beau-frère !

Max              Eh ben, j’aurai bientôt connu toute la famille ! Alors, si vous êtes le beauf ça veut dire que vous êtes… attendez parce que moi, les trucs de famille, j’ai toujours eu du mal. Alors, vous, vous êtes le beau-frère de… et vous, vous êtes sa mère. Sa mère de elle, pas sa mère de lui ! Si vous étiez sa mère de lui, lui, il serait comme elle, il serait vot’ fille, enfin vot’ fils, donc le frère de elle. Et vu que c’est pas son frère, mais, son beau-frère, ça veut dire… qu’y sont pas frère et sœur ! Donc on peut en déduire que…

Thérèse       Que c’est le mari de sa sœur !

Max               Hein ? Vous êtes le mari de vot’ sœur ?

Thérèse        (en aparté) Mais d’où il sort, celui là (A Max) Mais non ! C’est le mari de mon autre fille, Patricia !

Max               Ah d’accord ! Ca y est, je suis fixé, comme disait Jésus ! (Il rit de sa vanne sous les regards consternés de Thérèse et Rémy. Pensant qu’ils n’ont pas compris il répète) Fixé, comme disait Jésus !... Hein !... Jésus… Fixé… Je sais, elle est pas facile, faut la comprendre.

Thérèse       Si, si, on a très bien compris !

Rémy            (Prenant Thérèse à part) C’est pas possible ! Florence ne peut pas être avec… ça !

Thérèse        Pourtant, il faut bien se rendre à l’évidence ! Il fallait quand même qu’elle soit gravement désespérée pour se jeter dans les bras de… d’un… d’un engin pareil ! Vous voyez mon petit Philippe…

Rémy            Rémy !

Thérèse        C’est pas le sujet ! Vous voyez, on avait bien raison avant hier. Quand elle répétait que tout allait bien. Patricia et moi, on le sentait, que ça n’allait pas. Les femmes sentent ces choses là. Voyez le résultat. À propos de Patricia, prenez des précautions pour lui annoncer. Ca va lui mettre un coup ! Elle est fragile !

Rémy             Patricia fragile !? Justement, je ne sais pas si je saurai faire, par rapport à sa fragilité. Il serait mieux que ce soit vous qui lui appreniez. Et puis… il n’est pas utile de lui dire… que je suis passé. C’est mieux ! C’est mieux pour elle ! Elle va me demander des explications et je ne sais pas si j’aurai les mots qui conviennent, vu sa… fragilité.

Thérèse        Vous avez raison ! Bourrin comme vous êtes ! Il est préférable que je le fasse.

Rémy             Vous savez quoi de… lui ?

Thérèse       Rien mais c’est déjà trop !

Rémy            Donc, vous êtes monsieur… comment déjà ?

Thérèse       Vous aussi vous avez du mal avec les prénoms ?

Max               Max !

Rémy            Et vous connaissez ma belle sœur depuis longtemps ?

Max               Ouh là, oui ! Ca fait plus de deux heures !

Rémy            Deux heures ! Et vous êtes déjà installé chez elle !

Thérèse       Elle a complètement perdu la tête !

Rémy            Et donc vous êtes son… petit copain ?

Max                           Eh ouais ! Bon, attention, on n’a pas encore… enfin, vous voyez. On n’est pas des bêtes.

Rémy            Oui, oui, je vois très bien !

Max                           Mais ça devrait pas tarder. Elle à l’air un peu « chaudasse » la belle frangine.

Thérèse        « Chaudasse » ! Je vais me réveiller ! Ce n’est pas possible, je vais me réveiller. Partons maintenant ! Moi j’en ai assez vu et entendu. (À Max) On va vous laisser !

Max               Vous ne voulez pas l’attendre ? Elle va pas tarder !

Thérèse       Non, on n’a pas le temps, on repassera… peut-être… un jour.

Max               Comme vous voulez ! À plus alors ! (En riant) À plus dans le bus. Pas trop dans le métro ! Ah ah ah !

Rémy            Quand je pense que c’est moi le beauf ! (Ils sortent)

Scène 4 : Max – Charlotte

Charlotte     (Sortant de la salle de bain, toujours avec son maillot de foot) Juste  à l’heure pour le match ! Ca va, toi ?

Max               Tranquille ! Tiens y’a…

Charlotte     Excuse-moi, j’ai pas le temps, le match va commencer !

Max               C’était juste pour te dire…

Charlotte     Tu me diras après, y’a rien qui presse. Pendant le match, profite de la salle de bain, il y a une baignoire, ça doit faire un moment que t’en as pas vu. Je suis dans la chambre. À tout’ !

Max               À tout’ ! (Elle sort chambre il va salle de bain avec son sac à dos)

Charlotte     (Revient et va à la cuisine) J’allais oublier l’essentiel ! (d’où elle ressort, un pack de bière à la main) Pack de six !? Je ne sais pas si ça fera tout le match ! (Elle ressort chambre)

Max               (ressort de la salle de bain) J’allais oublier l’essentiel ! (il prend la bouteille de whisky, regarde le niveau) Je ne sais pas si ça fera tout le bain ? (il ressort)

NOIR court

Scène 5 : Florence – Charlotte

(Florence rentre)

Florence       Charlotte ?... Charlotte, tu es là ?... (Elle voit la guitare) Je ne savais qu’elle jouait de la guitare. Charlotte ?...

Charlotte OFF   Oh oui ! Oh oui ! Ouiiii vas-y !... Qu’est-ce que t’attends ? Vas-y, mets là dedans !... Allez, mets là au fond !... Ooooh c’est pas possible ! À côté ! Quel gros nul !... Il est tout seul, y’a rien pour le gêner, il réussit à la mettre à côté ! (Elle rentre énervée. Elle est en short ou jogging, maillot de foot, une bière à la main)  C’est pas possible, une nullité pareille ! Ah Florence, t’es rentrée ! L’autre gros naze, il est tout seul à six mètres du but, tout seul, il shoote à côté du ballon ! Un but tout fait ! Non, non, non, j’ai jamais vu ça ! Moi, si je suis l’entraineur, je le sors direct ! Sylvain Derondi ! Le joueur le plus nul de la galaxie... Ben, t’en fais une tête !

Florence       Non c’est rien ! En t’entendant, j’ai eu des images que je ne peux pas décrire, mais un peu glauques.

Charlotte     Glauques ? C’est du foot, c’est pas glauque ! C’est l’autre nul de Derondi qui est glauque ! Tu veux une bière ?

Florence      Non merci ! Ta journée s’est bien passée ?

Charlotte     Super ! J’te raconterai mais là, j’ai pas l’temps. Y’a 0-0 et c’est tendu ! (Elle ressort)

Florence       Pfff j’ai eu des chaleurs là ! Un peu de détente ne me fera pas de mal. (Elle veut se servir un whisky mais ne trouve pas la bouteille) Tiens, mais où est le whisky ? Je pensais pourtant qu’il en restait. (Elle va à la cuisine et revient avec une autre bouteille) Heureusement que j’en avais une en réserve. (Elle se sert un verre, prend une revue et se met dans le canapé – un temps – On sonne, elle va ouvrir et revient avec Raphaël)

Scène 6 : Florence – Raphaël - Charlotte

Raphaël       Salut Florence ! Je ne te dérange pas ?

Florence       Pas du tout. Je rentre du boulot. Je viens de me servir un verre. Tu en veux un ?

Raphaël       Pourquoi pas !

Florence      (En le servant) Assieds-toi ! Quoi de neuf ?

Raphaël        Bonne journée au boulot, et très bonne nouvelle. J’ai fait signer un gros contrat à un très gros client. Mon boss était super content et je pense que, très prochainement, je devrais avoir de l’avancement. Mon supérieur doit bientôt prendre sa retraite, et avec ce contrat, je suis en pole pour lui succéder.

Florence      Magnifique ! Félicitations ! (ils trinquent et vident leurs verres) Ah, pendant que tu es là, tu pourrais me rendre un petit service…

Charlotte OFF        Ouaaaaaaaaaaaaaaais !!!! (Elle arrive surexcitée les mains en l’air , fait le tour de la pièce en courant) Buuuuut ! (Elle mime la scène) Débordement sur la droite, il met dans le vent deux défenseurs, centre, reprise de volée, pleine lucarne. Un but d’anthologie ! Sylvain Derondi, meilleur joueur du monde ! Salut Raph ! J’y retourne ! (Chantant) « On sera vainqueur, on sera vainqueur, la victoire on l’a dans l‘cœur ! » (Elle ressort Raphaël fait un signe d’incompréhension à Florence)

Florence      C’était Charlotte !

Raphaël       Oui j’ai vu ! Qu’est-ce qu’elle fait là ?

Florence      Elle regarde un match « hyper important ». Je l’héberge quelques jours, elle s’est embrouillée avec son mec, il l’a fichue à la porte.

Raphaël        C’est jamais simple avec elle ! Elle attire les ennuis comme le sucre attire les guêpes. Toi qui souhaitais être seule quelques temps !

Florence      C’est vrai qu’avec Charlotte ici, ce n’est pas très reposant. Un véritable ouragan ! Et j’ai une grosse journée aujourd’hui, je suis crevée.

Raphaël        Tu me parlais d’un service

Florence      Oui, une porte d’un élément de cuisine s’est décrochée et je n’arrive pas à la remettre. Tu peux regarder ?

Raphaël        Bien sûr ! Je ne suis pas un grand bricoleur mais ça devrait être dans mes cordes. (ils sortent cuisine)

(Max ressort de la salle de bain, il est en peignoir, il a la bouteille vide à la main)

Max                          Je savais bien que ça ne suffirait pas ! (il voit l’autre bouteille sur la table basse) Magnifique, il y a des munitions ! (il échange les deux bouteilles et retourne salle de bain. Raphael et Florence reviennent de la cuisine)

Raphaël       Voilà ! Rien de bien compliqué !

Florence      Tu as bien mérité un deuxième verre. (voyant la bouteille vide) Mais ?... Je délire ou quoi ?

Raphaël       Qu’est ce qui se passe ?

Florence      Avant que tu arrives, j’ai voulu prendre la bouteille de whisky qui était ici, je ne l’ai pas trouvée, alors je suis allé chercher une bouteille à la cuisine. C’est d’ailleurs là que j’ai cassé la porte.

Raphaël        Et alors ?

Florence      C’était une bouteille neuve ! On a bu un verre chacun et là, elle est vide

Raphaël       Tu es certaine ?

Florence      Oui ! Ou alors, c’est Charlotte ! Charlotte !… Charlotte !...

Charlotte OFF          J’ai pas le temps !

Florence      C’est toi qui a le whisky ?

Charlotte     Non, moi j’ai ce qu’il faut et le whisky, j’aime pas ça !

Florence      Je n’y comprends rien !

Raphaël       Tu as dit que tu étais crevée, c’est peut être la fatigue.

Florence      A ce stade là, c’est plutôt de la démence !

Raphaël        Une bonne nuit de sommeil et ça ira mieux. Pour parler d’autre chose, j’ai beaucoup réfléchi après notre conversation d’hier, à propos de ta sœur.

Florence      Et ?

Raphaël       Je crois que je vais lui parler !

Florence      Ah oui ! Tu es vraiment mordu !

Raphaël        Je ne suis pas mordu, je suis raide dingue ! J’ai jamais ressenti ça pour une autre femme. C’est toujours elle que j’ai en tête. C’est fou !

Florence      C’est fou, je confirme ! Quand on connaît son caractère… Alors, tu as décidé de lui parler. Et tu vas lui dire quoi ?

Raphaël       Tout ! Tout ce que je ressens ! Tout ce que j’éprouve pour elle !

Florence      Et tu n’as pas peur de sa réaction ?

Raphaël        Sa réaction, je la connais d’avance. Elle va rire, elle va se moquer de moi et finir par m’envoyer paître, peut-être même en m’insultant. Mais au moins, je lui aurai parlé et je pense que ça me soulagera.

Florence      Oui, peut-être ! Je ne sais pas ! Soit ça te soulage, soit ça te casse encore plus. Il y a un risque.

Raphaël        Pas sûr ! J’y ai beaucoup pensé et je crois que c’est la bonne solution. Je me dis que, si sa réaction est celle que je prévois, ça ne sera pas pire pour moi. Dans ce cas de figure, je saurai qu’il n’y a vraiment aucun espoir et ça m’aidera à me faire une raison. Enfin j’espère !

Florence      Oui, moi aussi !

Raphaël        Mais, il y a peut-être une infime chance qu’elle m’écoute, et dans ce cas, qui sait ? Mais, au moins, j’en saurai plus et je ne serai plus dans le doute. C’est ça qui ronge ! C’est le doute qui fait mal. Ne pas savoir. Je suis persuadé qu’elle se fiche de moi éperdument, MAIS il y a un doute. C’est ce doute que je voudrais lever. Maintenant, pour lui parler, il va falloir y mettre les formes et prendre des précautions. Tu en penses quoi ?

Florence      Que c’est un terrain miné ! Mais tu n’as pas tort pour le doute, et tu sais ce qu’on dit : « tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir ».

Raphaël        Mais on ne dit pas : « tant qu’il y a de l’espoir il y a de la vie ». La preuve en est que, moi qui ai toujours un peu d’espoir, je n’ai pas une vraie vie.

Florence      Qu’est-ce que tu veux dire ?

Raphaël        Je veux dire qu’à mon âge, si je suis toujours célibataire, ce n’est pas par volonté ou par philosophie de vie.

Florence      Tu as toujours eu des relations avec d’autres filles, pourtant !

Raphaël        Bien sûr ! Comme disait Brel : « il faut bien que le corps exulte ». Mais des relations qui ne durent pas ! Le plus que j’ai fait avec une fille, c’est quoi ?

Florence      (En riant) Cinq minutes !

Raphaël        Idiote ! Je ne parle pas de ça ! Non, ma liaison la plus longue, deux mois ! Et si ça ne dure pas, c’est à cause de moi. Parce que je n’arrive pas à me sortir Patricia de la tête. Il faut que je lui parle !

Florence      A tes risques et périls !

Raphaël       Allez ! Je t’ai assez ennuyé, je vais te laisser te reposer maintenant.

Florence      Merci ! Je pense que je vais aller me glisser dans un bon bain, bien chaud, pour me détendre un peu. (On sonne) Encore ! Décidément, plus je souhaite être seule et plus je suis entourée (Elle va ouvrir et revient avec Patricia)

NDA : Vous avez lu environ la moitié de cette pièce. Cela vous aura permis de vous faire une bonne idée du thème, du ton, des personnages et de leurs caractères.

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Piercy.noel@neuf.fr  ou  piercy.noel@gmx.fr

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